Un désir d'éternité
Pouvons-nous sentir le poids de l'air au dessus de nous?...
Et ce n'est pas pour autant que l'on puisse en considérer l'absence.
Et dans notre immense ridicule, on se croit capable de le maitriser, moqueurs, jouant, l'air de rien, avec une petite fumée que l'on exhale et de laquelle on dépend...
Béni soit l'invisible, l'immuable, l'intouchable, l'inchangeable, guide de l'Homme dans le moindre de ses pas vers un trépas certain, aussi aveugle qu'il puisse y être...
Il a le poids du vent qui lui obéit et met un nom sur l'infini.
Le temps, omnipotent est-il, et seul vrai juge. Il change et changent les cœurs des Hommes qui ne parviennent pas à saisir la dureté des chaines par lesquelles il les traine.
Quand ils le considèrent, ils le considèrent avec respect, ils le comptent, ils en dépendent, ils en ont peur...
Ils l'admirent à travers des cadrons tels les bracelets de marquage, qu'ils s'attachent au poignet pour observer son avancement. Et il les dépasse, il s'écoule, il accélère, il marque des pauses, fier d'être le dur maitre qu'il est.
Il sème le ravage dans son sillage et transforme tout ce qui est en la poussière qui rempli nos déserts... sabliers du monde et à l'image de son futur...
Ne suffirait-il pas d'arrêter le vent qui gonfle le sable pour l'arrêter? Ce sable qu'est l'histoire balayée par l'étendard du temps qui passe, qui efface les blessures, qui enterre les souvenirs et qui nous efface de la mémoire du monde quand il ne veut plus de nous.
Il nous traine, accablés que nous sommes, par nos chaines qu'on tante -en vain- de forcer, de toutes nos forces, dans un accès de colère magistrale mêlée de refus et d'un soupçon de désespoir...
Et dire qu'il ne fait que passer et passe en dépit de tout.
Il nous ignore dans l'abstrait presque poétique de ses perditions silencieuses à travers les plaines de nos grandeurs...
Il se hâte à la vue de nos amours, observe avec intérêt nos moments de solitude et s'arrête sur nos tombes jeter une dernière fleur à l'ombre nos sépultures comme pour dire que nous ne sommes pas si importants...
Nous en avons peur, et cette peur a toujours été la motrice de nos accomplissements, de nos exploits, de nos désirs. Notre temps s'écoule et cela nous pousse à révérer la vie, à la défendre, à la sacraliser, à la raffiner... et nous avons étouffé celles des autres pour ce faire... mais rien de tout ceci n'arrête le cours du temps, cet ancien voyageur.
Un désir intemporel nous anime, celui de convoiter l'éternité... et nous restons à peindre la terre de rouge et le ciel de noir pour atteindre une éternité pour laquelle nous sommes le dernier des soucis.